La vache & le pangolin #5 ÉPISODE 5

FERME EXPÉRIMENTALE

« Que pourrait-on faire d’autre ici ? », nous lance Pascal Lecoeur un éleveur convaincu, en étendant la main vers de vastes et grasses prairies. Nous sommes alors dans les Montagnes noires, à Trévarez , dans une ferme expérimentale, la première à avoir obtenu en Bretagne le label « élevage biologique ».. Pascal en est responsable. Il est le premier dans sa famille à faire dans les vaches écolo. Plus d’espace, une vie en plein air, une nourriture saine. Pascal aime les vaches, c’est toute sa vie. On trouve trois races ici : les limousines à la robe beige, les normandes blanches à taches brunes, et les fameuses Holstein, qui ressemblent à la noiraude, au fort rendement de lait. Pascal essaye des croisements entre elles. Il est issu d’une lignée paysanne se perdant dans la succession des siècles. Leur ferme familiale, dans laquelle polyculture et troupeau de quelques vaches suffisaient pour vivre il y a peine 60 ans, ses parents l’avaient transformé en une exploitation d’élevage intensif (la si curieusement nommée « Révolution verte » des années 50 oblige).

Lorsque la ferme expérimentale ouvre à Trévarez, Pascal , dont le plaisir est de boire chaque matin un immense verre de lait (conscience et passion professionnelle) saute le pas. Pascal c’est notre premier point de rencontre avec l’élevage laitier. Le gérant de la ferme expérimentale nous familiarise avec les défis auxquels doit aujourd’hui faire face la production laitière, symbole de la Bretagne rurale. Car la Bretagne c’est vraiment la terre du lait. C’est le lait qui est ici depuis toujours à la base de l’alimentation. On pense aux crêpes bien sûr, au beurre, encore davantage, que l’on étale sur du pain, presque sans réfléchir, dès que l’on a une baguette à proximité de la main. À la crème ou au lait ribot aussi. Le lait, pendant longtemps, fut l’eau potable de la campagne. Et c’est le lait qui a façonné les paysages bretons. Depuis la seconde guerre mondiale jusqu’à aujourd’hui, son économie agricole repose en grande partie sur l’élevage, le pâturage et la production laitière.

Bref le lait c’est un breuvage, c’est un ingrédient, c’est une identité, mais c’est surtout c’est de l’or blanc... Or depuis des décennies les problèmes de surproduction, de quotas, d’endettement et de faillite nécrosent le milieu laitier. Aussi on cherche à se transformer, trouver de nouvelles voies, de nouvelles façons de faire.

Texte David Wahl
Photographie Sébastien Durand